Propriété intellectuelle

Risques liés à la propriété intellectuelle, et leur gestion - Le concept de « propriété intellectuelle » fait référence à un ensemble de droits couvrant diverses œuvres intellectuelles (inventions, logiciels ou secrets industriels, entre autres). Les droits liés à la propriété intellectuelle jouent un rôle déterminant dans l’acquisition, la mise en œuvre et l’exploitation des technologies d’une ville intelligente, soulevant des risques qu’il faut gérer avec soin.

Droit d’auteur

La législation canadienne précise qu’un droit d’auteur accompagne toute œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique qui est originale et offerte sur un support matériel. Les programmes informatiques tombent généralement sous la catégorie d’« œuvre littéraire » et sont donc assortis d’un droit d’auteur. Par contre, la situation est moins tranchée pour ce qui est des données informatiques. Lorsqu’elles sont comprises dans une compilation originale au sens de la Loi sur le droit d’auteur, c’est-à-dire résultant d’un choix ou d’un arrangement, ces données sont protégées par un droit d’auteur. En règle générale, par contre, les œuvres ne constituant rien de plus que le résultat évident ou mécanique d’un exercice quelconque ne sont pas protégées. La protection des données comprises dans une compilation dépendra donc surtout du jugement ou du talent exercé par l’auteur de la compilation.

L’identité du détenteur du droit d’auteur protégeant les données (le cas échéant) peut soulever certains risques liés à l’utilisation et au partage de ces données. Dans le cas d’une ville intelligente, cette dernière pourrait devoir obtenir soit un permis pour l’utilisation des données protégées soit la cession du droit d’auteur qui les protège, ce qui pourrait s’avérer très coûteux. En outre, la municipalité pourrait se retrouver prise en otage si ces données sont essentielles à ses activités, les individus ou sociétés détenant le droit d’auteur pouvant alors imposer des demandes outrancières en échange de l’utilisation des données.

Propriété des données

Les initiatives de ville intelligente reposent souvent sur un partenariat entre des organismes publics et des sociétés privées aux fins de la production et de l’utilisation des données requises. De tels partenariats soulèvent la question compliquée de la propriété de ces données. Une municipalité peut souhaiter mettre fin à un partenariat pour s’associer à une nouvelle société ou à un nouveau fournisseur. Si le partenaire initial prétend être propriétaire des données recueillies ou traitées dans le cadre du partenariat (p. ex. les heures d’arrivée par les transports publics), la municipalité se verra dans l’impossibilité de librement utiliser ou communiquer ces données.

Droits liés aux renseignements confidentiels (secrets industriels)

Il arrive souvent que les municipalités et les institutions gouvernementales recueillent les renseignements personnels des citoyens. Par contre, elles ne peuvent pas en disposer comme bon leur semble. En effet, la Loi (fédérale) sur la protection des renseignements personnels et ses équivalences provinciales encadrent ce que les institutions gouvernementales peuvent faire des renseignements qu’elles détiennent. De plus, la Loi (fédérale) sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et les lois équivalentes en Alberta, au Québec et en Colombie-Britannique visent les activités commerciales non essentielles du secteur privé. Ces lois s’appliquent donc presque toujours à l’utilisation et à la communication des données découlant d’un partenariat entre une ville intelligente et une société privée.

Propriété industrielle

Le droit des brevets accorde à un inventeur un monopole d’une durée limitée sur son invention. Toute invention reposant sur un logiciel peut être brevetée, et ce, en dépit du fait que le logiciel lui-même ne peut l’être, étant plutôt protégé par le droit d’auteur. Par ailleurs, plusieurs des technologies que souhaitent utiliser les villes intelligentes peuvent être brevetées, comme des capteurs inédits, des mécanismes de connectivité originaux ou de nouvelles méthodes de traitement de l’information. Les villes devront donc garder à l’esprit ces questions de propriété industrielle.

Les villes intelligentes privilégiant le recours à des technologies normalisées et interopérables afin de pouvoir communiquer entre elles et interagir, l’utilisation de technologies brevetées pourrait créer des difficultés. Les brevets peuvent en effet étouffer l’innovation en empêchant l’interopérabilité avec une technologie rivale, ou peuvent imposer un permis d’utilisation ou de réparation. Si aucune solution de rechange n’est possible et que le permis est refusé ou trop coûteux, la ville intelligente se verra dans l’impossibilité d’utiliser la technologie dont elle a désespérément besoin.

Droits de propriété industrielle et commerciale

Toute discussion entourant un permis ne peut faire autrement que de soulever la question des droits de propriété industrielle et commerciale, ces derniers visant à empêcher l’utilisation non autorisée d’un produit, d’un système, d’une technologie ou d’un service de marque. Une ville intelligente pourrait devoir payer davantage pour l’utilisation de tels produits, systèmes, technologies ou services, sans compter que cette utilisation soulève des questions d’interopérabilité et de normalisation. Comme dans le cas d’un produit breveté, le fournisseur d’un produit protégé par un droit de propriété industrielle ou commerciale pourrait interdire que sa mise en marché allègue une compatibilité avec d’autres produits de marque, surtout lorsque se rajoutent des exigences de permis.

Contrats : permis et acquisition

Un permis autorise l’utilisation, généralement à un coût négocié, d’un produit protégé par un droit d’auteur, un brevet ou un droit de propriété commerciale ou industrielle. Le détenteur du droit ou du brevet peut aussi le céder en tout ou en partie à une autre personne, encore une fois généralement à un coût négocié. Lorsque surgissent des questions de propriété ou de permis, il est préférable de les régler directement à la source. Ainsi, lorsqu’une ville intelligente négocie avec un fournisseur, un entrepreneur ou toute autre partie, ses représentants devraient se pencher sur les questions suivantes :

  • L’obtention d’un permis ou la cession d’un droit d’auteur, le cas échéant;

  • La propriété des données dans l’éventualité où la municipalité n’est pas la seule à les produire ou les traiter;

  • L’application des lois fédérales et provinciales de protection de la vie privée à l’utilisation et à la communication des données;

  • L’octroi d’un permis d’utilisation d’une technologie pouvant être brevetée;

  • L’octroi d’un permis d’utilisation d’une technologie protégée par un droit de propriété commerciale et industrielle; et

  • Les garanties et assurances de titre de propriété ou de non-violation afin d’éviter tout désaccord ultérieur.

Éducation : les limites de la propriété intellectuelle

Il est tout aussi important que les employés municipaux faisant appel à la propriété intellectuelle dans la mise en œuvre de nouvelles technologies et de nouveaux services comprennent les risques qu’elle soulève. Ces risques, énumérés ci-dessus, sont faciles à cerner lorsqu’un brevet ou une marque de commerce entre de façon évidente en ligne de compte, mais sont plus difficiles à relever dans le cas de toutes nouvelles données ou analyses résultant d’un partenariat. C’est pourquoi les employés municipaux devraient donc toujours garder à l’esprit ces risques liés à la propriété intellectuelle et en avoir une connaissance générale dans le contexte de tout partenariat. À cette fin, des consultations avec des experts juridiques en propriété intellectuelle seront utiles.

Ressources

Guides et trousses

Canadian Intellectual Property Office, “Plan your IP strategy”

  • Résumé des questions à ne pas négliger dans l’élaboration d’une stratégie de propriété intellectuelle qui appuie les objectifs de l’organisation, notamment en lien avec la mise en marché, la propriété et la collaboration avec des tiers.

Bereskin & Parr, “The Licensing and Commercializing of Intellectual Property”

  • Étude plus approfondie du processus d’octroi de permis impliquant la propriété intellectuelle, comprenant les dispositions contractuelles les plus courantes, et une discussion sur la conception et l’exploitation de technologies en coentreprise.

Autres ressources

“IP in business transactions: Canada overview”, (Practical Law)

  • Survol des différents droits liés à la propriété intellectuelle au Canada, l’octroi de permis, la cession de ces droits et autres questions connexes dans un contexte de regroupements d’entreprises.

Office of the Privacy Commissioner of Canada, “The Application of PIPEDA to Municipalities, Universities, Schools, and Hospitals”

  • Survol de l’application de la LPRPDE aux activités commerciales non essentielles des municipalités, des universités, des écoles et des hôpitaux.

Canadian Intellectual Property Office, “IP foundations series”

  • Document d’information sur la propriété intellectuelle au Canada, notamment sur les brevets, les marques de commerce et les caractéristiques d’apparence.

Teresa Scassa, “Smart Cities: Data Ownership and Privacy Issues”

  • Brève discussion sur la propriété des données découlant des villes intelligentes et sa compatibilité avec les principes d’un gouvernement ouvert.

Compute Ontario & Orion, “Building Ontario’s Next-Generation Smart Cities Through Data Governance, Part 4: The Future of Ontario’s Data”

  • Dernier d’une série de rapports sur les conclusions d’une étude sur les villes intelligentes, portant notamment sur les diverses parties prenantes et les technologies en jeu, le tout axé sur la gouvernance en lien avec les données.

MaRS Discovery District, “A Primer on Civic Digital Trusts”

  • Document d’information sur une forme de gouvernance en lien avec les données : les fiducies de données (appelées « fiducies numériques municipales » dans le document); également applicable à d’autres avoirs numériques.

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